Notre-Dame-Des-Landes : Face à la nécessité de dialogue, le gouvernement ne peut pas se cacher derrière l'argument de la légalité

Le gouvernement a pris la responsabilité d'intervenir brutalement depuis la semaine dernière dans la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, avec un discours de confusion entre le nécessaire maintien de l’ordre public et l’invocation d’un retour immédiat à l’Etat de droit. Ce dernier, indispensable, ne peut être que progressif et articulé avec le respect des libertés publiques. C'est un aveu de faiblesse. Les images d'une armée de 2500 gendarmes détruisant à l'aide de blindés, de pelles mécaniques et sous la "protection" de milliers de grenades, des constructions en bois, terre et paille resteront comme la marque de la disproportion totale entre les buts affichés et les moyens employés. France Nature Environnement condamne également toutes les agressions physiques : cette logique d’escalade de la violence doit être absolument stoppée. Ce territoire heureusement épargné d’un néfaste projet d’aéroport doit retrouver le calme nécessaire à la construction collective d’un avenir serein.

 

Dans ces conditions dégradées, la responsabilité de la reprise et de la réussite des négociations est de fait du côté du gouvernement. Il lui appartient de restaurer la confiance dans la parole publique et de créer les conditions de négociations constructives, respectueuses des projets existants, associant toutes les parties prenantes. Pour cela, il est nécessaire de permettre un montage des dossiers de "régularisation" qui tienne compte du temps nécessaire aux démarches administratives, juridiques et économiques. La confiance ne peut se restaurer qu’à la condition d’un retrait maximal des effectifs de police ainsi que l'arrêt complet de toute destruction. De l'autre côté, l'engagement à la "libération" des routes et à leur non dégradation ne doit pas connaître d'exception. Le bocage de Notre-Dame-des-Landes est un territoire de libre circulation, sur lequel les uns n'ont pas de droits supérieurs aux autres.

 

L’argument de légalité, derrière lequel certains se cachent, est en réalité inexact : l'Etat est en capacité légale de négocier des conventions d'occupation et d'utilisation des terres, qui peuvent comporter des conditions d'usage, notamment en matière de respect de l'environnement, et qui ne nient pas sa propriété. Il peut donc accepter de conventionner des projets, individuels ou collectifs, d’agriculture, d’artisanat, incluant l'expérimentation de nouvelles formes d’organisation et de vie collectives, d’une autre relation à la nature, d’une approche différente de l'agriculture dans ce périmètre bien identifié. L’engagement collectif d’agriculteurs vers des pratiques respectueuses de l’environnement est même officiellement encouragée au travers des Groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE), l’un des outils structurants du projet agro-écologique pour la France.

 

Ce qui se joue à Notre-Dame-des-Landes dépasse en partie ses acteurs. La dimension symbolique de cet affrontement mériterait d'être relativisée, pour permettre de parler plus concrètement et positivement du devenir de quelques centaines d'hectares de milieux humides précieux. Pour France Nature Environnement, il ne peut être question que les terres concernées par l'ancien projet d'aéroport soit réallouées sans discernement. L'Etat doit être le garant de projets contribuant à la préservation des milieux existants, sur la base d'objectifs partagés : gestion intégrée du territoire, respectueuse de sa biodiversité et de ses particularités ; construction d'un projet ouvert aux innovations, y compris dans le modèle foncier. Ces garanties ont été jusqu’ici minorées : France Nature Environnement demande à ce qu'elles soient spécifiquement prises en compte et sollicitent l'intégration d'une représentation de son mouvement au comité de pilotage initié par la préfecture, au regard des importants enjeux environnementaux pour construire ce cadre commun, ce qui suppose de réécrire des règles, notamment en matière d’urbanisme.

 

Malgré les délais inutilement contraints édictés par l'Etat, France Nature Environnement souhaite le dépôt cette semaine de projets, individuels ou collectifs, dans une démarche coordonnée, qui n’est pas un reniement de la richesse de ce qui se vit sur la ZAD mais la première étape d’un projet de territoire durable.  France Nature Environnement demande expressément à la Préfète de Loire Atlantique de s'engager à aplanir les difficultés de type administratif, y compris concernant les délais de dépôt/montage des dossiers.  Le retour à des affrontements dangereux et stériles ne servirait ni l'Etat, ni la société, ni le devenir de ce territoire précieux.

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