Le Sénat demande le gel du financement par l’État des nouveaux projets de LGV, en vue de donner la priorité à la modernisation des réseaux existants. Rapport d'information du 28 septembre 2016 au nom de la commission des finances sur le financement des infrastructures de transport (fichier PDF 1,5 Mo).
Ce rapport intervient après le rapport critique de la Cour des comptes (La grande vitesse ferroviaire : un modèle porté au-delà de sa pertinence, octobre 2014) et l’arrêt du Conseil d’Etat du 15 avril 2016 annulant le décret déclarant d’utilité publique les travaux de la construction de la LGV Poitiers-Limoges.
Vous trouverez ci-contre le rapport d'information fait au nom de la commission des finances sur le financement des infrastructures de transports du 28 septembre 2016.
Les principales observations
1. Les travaux de la commission « Mobilité 21 » ont permis de hiérarchiser les projets d’infrastructures de transport à réaliser à moyen et long termes, ce qui constitue un progrès par rapport au schéma national des infrastructures de transport (SNIT) de 2011. Une structure permanente chargée du suivi régulier de cette programmation fait néanmoins toujours défaut.
2. Si la France dispose d’une solide expérience en matière d’évaluation socio-économique et d’un dispositif de contre-expertise performant depuis la création du Commissariat général à l’investissement (CGI), les évaluations des projets d’infrastructure de transport souffrent encore trop souvent d’un biais optimiste tandis que la définition du plan de financement intervient à un stade très tardif, ce qui peut mettre en péril la soutenabilité de certains projets.
3. La concession est un outil ancien ayant fait ses preuves pour développer le réseau autoroutier. Néanmoins l’allongement de la durée des concessions autoroutières pour financer des plans de relance des investissements est une méthode opaque, rendant quasiment impossible la connaissance précise du taux de rentabilité des concessions.
4. Malgré le recours assez rare aux contrats de partenariat public-privé dans le domaine des transports, le risque d’affaiblissement des capacités de maîtrise d’ouvrage des personnes publiques est réel et constitue un sujet de préoccupation légitime.
5. L’étendue et la qualité de ses équipements routiers et ferroviaires valent à la France d’être classée au septième rang des réseaux d’infrastructure au monde mais sa situation relative se dégrade en raison du vieillissement de ses réseaux historiques. L’effort de régénération du réseau ferroviaire de 2,5 milliards d’euros par an permet seulement de limiter ce phénomène, tandis que les travaux réalisés sur le réseau routier national non concédé sont principalement curatifs et non
préventifs.
6. Les projets de développement des grands réseaux de transport demeurent très ambitieux, alors même que les lignes à grande vitesse les plus pertinentes ont déjà été construites et que le modèle de la grande vitesse ferroviaire connaît aujourd’hui des difficultés.
7. Si la France a investi suffisamment dans les infrastructures de transport, avec en moyenne un niveau d’investissement représentant 1 % de son produit intérieur brut (PIB) au cours des vingt dernières années, les crédits budgétaires consacrés par l’État – soit 4,4 milliards d’euros en 2015 - sont désormais insuffisants pour faire face aux engagements souscrits en faveur de projets de grande ampleur.
8. Même si son fonctionnement manque toujours de transparence, y compris à l’égard du Parlement, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) est un outil utile en ce qu’il permet de sanctuariser les crédits pluriannuels destinés aux infrastructures de transport .
9. La dette de SNCF Réseau, qui a enregistré une hausse de 12 milliards d’euros entre 2010 et 2015 pour s’établir à 44 milliards d’euros, est devenue un fardeau très lourd, limitant fortement la capacité d’action du gestionnaire du réseau ferré national. Il paraît peu probable que l’entrée en vigueur de la « règle d’or » - dont le décret d’application se fait toujours attendre – permette d’apporter une solution à la hauteur des enjeux.
10. Si l’essentiel du financement du réseau autoroutier et les dépenses de fonctionnement des lignes à grande vitesse reposent largement sur l’usager, le réseau routier national, le transport ferroviaire de proximité et les transports collectifs en Île-de-France sont financés de façon croissante par l’impôt depuis l’abandon de la vignette automobile et de l’écotaxe poids lourds, soit une évolution à rebours de celle observée chez nos voisins européens.