Cahier d'acteur sur la LGV POCL

En préambule la FRANE rappelle qu’elle est membre de France Nature Environnement (FNE) et qu’à ce titre elle la représente en région Auvergne.

Par ailleurs la FRANE refuse de s’enfermer dans le seul choix entre les quatre tracés proposés et leurs variantes. Par contre elle tient à apporter des éléments de réflexion permettant d’avancer sur l’opportunité de la création de cette ligne LGV POCL sur le plan de l’atteinte à l’environnement et au vue des différents débats publics.
Tout d’abord elle constate que la plupart des tracés envisagés concerne une partie de l’Auvergne (l’Allier) et que les analyses faites n’impactent ni le Cantal ni la Haute-Loire.

 

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Ou lisez le ci-après.

 

 

Quels grands objectifs et fonctionnalités pour ce projet ?

 

Le projet inscrit dans le Grenelle de l’environnement à l’horizon 2020 et dans les 2500 kms de lignes nouvelles prévues l’est en raison pré supposée de la saturation de la ligne Paris-Lyon à un horizon de 10 ans. La FRANE s’interroge sur l’opportunité de cette inscription.

 

La priorité aux LGV se fait, avec un coût colossal, au détriment trop souvent du trafic de proximité et de la priorité au maintien et au développement des réseaux ferroviaires existants, qui ne sont ni entretenus ni optimisés pour développer un transport de fret permettant d’irriguer les territoires (à condition qu’on en ait la volonté) et un service public de transport en commun accessible à tous.

 

Les nouvelles lignes à grande vitesse ont un très fort impact environnemental et financier alors que la dette publique est déjà très élevée. Le financement devra incomber en partie aux collectivités territoriales au risque d’aggraver la pression  fiscale. En cas de stabilité de cette pression, le budget « infrastructures » des collectivités territoriales sera donc augmenté au détriment d’autres engagements tels que l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments, les mesures de restauration des milieux naturels ou d’autres orientations découlant du Grenelle. L’isolation des bâtiments nécessiterait plusieurs milliards d’euros par an pour prévenir la consommation d’énergie fossile, le changement climatique qui en est la conséquence et la note à payer pour se procurer cette énergie.

 

Nous sommes donc amenés à nous interroger sur l’expansion aberrante des infrastructures de transports qui peuvent déstabiliser, voire geler le développement local. Il n’est plus viable de favoriser la concentration anormale des trafics et des productions seulement sur les grandes métropoles.


Le projet propose bien sûr des hypothèses de développement. Toutefois, de nombreuses incertitudes demeurent (évolution de la population, coût du pétrole, possibilités budgétaires,…). Avoir une expertise exhaustive de ces enjeux nous paraît illusoire et, par expérience, nous savons que la justification officielle de la construction de ces nouvelles lignes se fait systématiquement sur des hypothèses de trafics et de rentabilités socio-économiques qui resteront à confirmer, ainsi que souvent sur une sous-estimation des coûts de réalisation pour mieux « vendre » un projet dont l’utilité réelle n’est pas totalement démontrée.

C’est tout l’objet du nouveau Schéma National des Infrastructures de Transport (SNIT) de s’appuyer d’abord sur des indicateurs fiables. Ceux-ci doivent servir de base aux démonstrations.

 

La FRANE demande : Que le projet soit viable financièrement sans assécher les finances des collectivités territoriales, en précisant le recours ou non à tout ou partie d’investissement privé.

 

Développement et stratégies territoriales

 

La desserte des territoires et l’optimisation des voies existantes, qui sont la solution alternative la plus acceptable d’un point de vue environnemental, et à un coût financier bien moindre que la construction de nouvelles lignes, correspondent à la mise en oeuvre en France de l’article 1 de la Loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement (solution préconisée aussi par le « Livre Blanc de Delors »).

 

Dans ces conditions, la FRANE défend une conception de l’aménagement qui couvre les besoins de déplacement local au même titre que la possibilité d’accéder aux grandes distances. Les projets futurs doivent donc marier desserte locale et LGV. 98 % des trajets ferroviaires correspondent à des déplacements de petites ou moyennes distances. Les moyens financiers, particulièrement contraints, ne doivent pas viser la seule extension de la grande vitesse. Il faudra donc que le projet puisse démontrer les capacités à ne pas assécher les lignes locales qu’il s’agit de reconsidérer. Le projet doit pouvoir croiser LGV et autres lignes locales et leurs interrelations. Plus largement, le projet doit aussi être analysé au vu des stratégies territoriales en matière de préservation de l’environnement et de la biodiversité.

 

La FRANE demande : Qu’il soit démontré que le projet n’aura pas comme conséquence d’assécher les lignes locales. Que soit établie véritablement la justification en matière socio-économique du projet pour les populations des territoires traversés et que soit précisées les caractéristiques du désenclavement attendu, et notamment montrer en quoi une variante peut contribuer au développement d’un axe Lyon / Bordeaux ou Nantes véritable axe d’aménagement du territoire.

 

La FRANE souhaite privilégier les gares existantes et intra-muros. Tout dépendra donc de l’utilisation des gares actuelles et de la localisation des gares nouvelles éventuelles. Au stade actuel de la réflexion, avec des fuseaux de 10 km de large, les conséquences sur l’aménagement des agglomérations sont difficilement prévisibles. La FRANE n’est pas favorable aux nouvelles gares TGV en pleine nature.

 

La FRANE demande : Que l’utilisation des gares existantes et intra-muros soit optimisée en privilégiant l’intermodalité, et que soient proscrites de nouvelles gares TGV en pleine nature (dites « gares betteraves »).

 

Transport et offres de service

 

La FRANE donne la priorité à l’augmentation des fréquences et de la régularité, par rapport aux gains de temps.

 

Tout dépendra alors de la desserte du réseau actuel. Quelle sera l’évolution des offres de services actuels : Intercités, TER ? Seront-ils améliorés en lien avec la desserte TGV de quelques pôles ?

 

Nous craignons particulièrement que l’effort financier nécessaire pour la LGV se fasse au détriment des autres liaisons.

 


Le dossier pour le débat public n’a pas abordé les questions plus fines sur l’exploitation, qui a des conséquences directes sur la conception future du projet. Par exemple pour des vitesses de 280, 320 ou 360 km/h, il aurait été utile de mettre en regard, face aux gains de temps :

- le surcoût des investissements

- l’usure du matériel et des infrastructures

- l’augmentation de la consommation électrique

- l’augmentation des incidences sonores

Aller toujours plus vite a des avantages faciles à comprendre, mais aussi des coûts et des inconvénients qu’il faudrait chiffrer et communiquer.

 

Peut-on vraiment avoir ces éléments pour un déplacement comme Clermont-Paris, ou Clermont-Lyon ? Ainsi que l’incidence sur le prix du billet ?

 

Enjeux environnementaux

 

Dans le contexte actuel, les enjeux environnementaux ne pourront être complètement appréhendés qu’au stade des avant-projets ou plutôt du tracé retenu.

 

Toutefois, il est évident que toute ligne LGV nouvelle entraîne un fort impact environnemental : fragmentation du milieu, impacts sur la trame verte et bleue et les continuités écologiques, destruction d’habitats naturels, d’habitats d’espèces sauvages et d’être vivants, consommation d’espaces, drainage des terrains aquifères, bruit... Nous ne nous faisons pas d’illusion sur les effets d’une telle infrastructure sur les milieux naturels déjà très altérés du fait de leur fragmentation. Ce genre d’impact est irréversible car il n’y a pas de mesures compensatoires techniquement réalisables.

 

Comment préserver non seulement les espaces protégés (ex RN, PN ...) et labellisés (ex ZNIEFF, N2000, PNR ....), et les espèces sauvages et leur habitat protégés, mais aussi les zones humides, la morphologie dynamique des cours d’eau traversés, le bocage, les espaces agricoles, les espaces de la trame verte et bleue, les continuités écologiques, et la biodiversité commune ?

 

Sur le plan environnemental, la FRANE ne pourra accepter en l’état ces propositions de tracé. Le seul fait qu’on puisse trouver des propositions dont certains annoncent brutalement le passage en forêt de Tronçais, en forêt de Gros-Bois et de Dreuille ou qui après avoir franchi la Loire se permette de franchir l’Allier, Sioule ou la Besbre et qu’on puisse se permettre de passer au travers des vignobles de Saint-Pourçain témoigne d’un dédain et d’un mépris de notre environnement et de la nature qu’on pourrait penser impensables au 21ème siècle.

 

La FRANE demande :

- Que soient réalisés des diagnostics environnementaux précis sur l’ensemble des territoires d’études pour identifier tous les impacts négatifs environnementaux et des inventaires naturalistes pour toutes les communes concernées par les fuseaux

- Que soit intégré le coût global de la biodiversité

- Que soient mesurés les risques que ferait courir l’infrastructure sur les espaces ainsi que les espèces sauvages et que soient étudiées les solutions pour y remédier (en premier lieu les solutions alternatives ).

Enfin la FRANE considère qu’il n’est pas inutile de citer un extrait du discours du Président de la République lors des conclusions du Grenelle de l’Environnement le 25 octobre 2007 : « …Toutes les décisions publiques seront arbitrées en intégrant leur coût pour la biodiversité. Très clairement, un projet dont le coût environnemental est trop lourd sera refusé… » … « …nous allons renverser la charge de la preuve. Ce ne sera plus aux solutions écologiques de prouver leur intérêt, ce sera aux projets  non écologiques de prouver qu’il n’était pas possible de faire autrement. Les  décisions dites non écologiques devront être motivées et justifiées comme ultime et dernier recours… ».

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