La Cour des comptes a rendu public, le 29 août 2016, un référé sur l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). La Cour souligne, indépendamment de la question du devenir de cette infrastructure, le caractère très préoccupant, pour l'équilibre futur des finances publiques, du financement du tunnel ferroviaire Lyon-Turin et du canal Seine-Nord. Réaction de France Nature Environnement.
Les deux arguments majeurs des promoteurs du projet sont la réduction du temps de trajet pour les voyageurs et le développement du fret. Or, selon l’étude socio-économique de l’enquête d’utilité publique de 2012, la mise en œuvre du projet Lyon Turin ne permettrait pas de baisser le nombre de poids lourds qui traversent les Alpes à l’horizon 2035. Au contraire, ce trafic devrait s’accroître de près de 50%!
Une alternative sous-exploitée
L’Europe et SNCF Réseau ont permis la modernisation de la ligne Dijon - Ambérieu - Modane - Turin. Un rapport européen de décembre 2006[1] évalue à environ 19 millions de tonnes de marchandises par an les capacités sur la ligne existante modernisée. Cette ligne entièrement modernisée est en service depuis 2012, or elle a transporté seulement 3,4 millions de tonnes de marchandises en 2012.
Demba Diedhiou, coordinateur du réseau transports et mobilités durables de FNE : « la solution alternative serait de développer dès à présent l’Autoroute ferroviaire alpine (AFA) depuis Ambérieu. L’AFA a l’avantage d’être entre les autoroutes A40 et A43 à l’est de Lyon permettant de diminuer significativement le trafic des poids-lourds en direction des tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus. »
Une écotaxe poids-lourds qui fait cruellement défaut…
Selon la Cour des comptes, l’AFITF a compté sur la perspective de l'écotaxe poids-lourds, abandonnée en 2014. En l’état des engagements budgétaires déjà pris, la trajectoire des dépenses de l’agence conduirait à une insuffisance cumulée de financement de 600 Millions d’euros à l'horizon 2019. Or, si l'État décide d'aller plus loin dans l'engagement et le financement de la partie internationale dutunnel ferroviaireLyon-Turin, conjointement au canal Seine-Nord, il devra dégager entre 1,6 et 4,7 Md€ supplémentaires. La Cour souligne le caractère très préoccupant de cette perspective pour l'équilibre futur des finances publiques.
Jean-Paul Lhuillier, spécialiste transports et mobilités durables de FNE : «Le Premier ministre a inauguré, le 21 juillet 2016, le tunnelier qui creusera la galerie de reconnaissance du tunnel ferroviaire Lyon-Turin après avoir eu connaissance le 10 juin par lettre en référé des observations formulées par la Cour. Nous regrettons l’entêtement de l’État en faveur de ce projet Lyon-Turin, alors que tous les signaux sont au rouge concernant ce chantier pharaonique. »
Denez L’Hostis, président de France Nature Environnement : « Nous demandons à l’État d’abandonner son soutien au projet Lyon-Turin, qui risque de porter atteinte à l’équilibre futur des finances publiques. Commençons par faire un meilleur usage de la ligne existante, modernisée, et en capacité d’accueillir dès à présent un trafic supplémentaire considérable. »
[1]« Estimation des potentialités du trafic fret à travers les Alpes »
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