L’objectif du plan est de réduire l’exposition de la population auvergnate aux facteurs de risques sanitaires liés à l’environnement. Un certain nombre de ces facteurs de risques sont bien identifiés : bactéries et plomb dans l’eau, amiante et radon dans les habitations et établissements recevant du public, particules et pesticides dans l’air pour ne citer que quelques exemples.
Il est cependant difficile d’attribuer à certaines pathologies, notamment les cancers, une origine purement environnementale, dans la mesure où dans de nombreux cas, l’âge et les comportements individuels interviennent fortement.
Depuis le début du premier plan (2004), des progrès considérables ont été accomplis dans le domaine des connaissances scientifiques et techniques ainsi que les procédés analytiques. Mais de nouvelles causes d’inquiétude sont apparues au grand jour : les résidus de médicaments et les substances issues des nanotechnologies dans l’environnement ; sans oublier les expositions aux rayonnements électromagnétiques. Par contre, des pathologies sont en nette régression comme le saturnisme infantile.
Le journal « La Montagne » publiait dans son édition du 08 décembre 2010 le résultats d’une étude intitulée « portraits de santé : l’état des territoires d’Auvergne » téléchargeable sur le site internet de l’ARS Auvergne www.ars.auvergne.sante.fr. Cette étude permet de mettre en évidence en Auvergne une surmortalité globale de +6,4% chez les hommes et de +1,7% chez les personnes de sexe féminin, par rapport aux valeurs nationales. La population de notre region qui se caractérise par sa faible densité et par son vieillissement relatif n’est pas, comparée à la moyenne du territoire métropolitain, dans un excellent état sanitaire.
Les déterminants de santé en Auvergne sont, selon les données de l’ARS, soit liés aux comportements (alcoolisme, tabagisme, sédentarité, habitudes alimentaires, prises de risques) soit le résultat de facteurs environnementaux comme l’arsenic dans l’eau ainsi que le radon dans les sols. En Auvergne, le cancer reste une cause de surmortalité (+3,2%) surtout chez les hommes (+4,5%). On enregistre plus de 7 000 nouveaux cas par an, dont 60% chez les hommes. Les cancers causent le décès de 3 900 auvergnats en moyenne par an, soit un peu plus du quart de l’ensemble des décès. Les cancers de la trachée, des bronches et du poumon, de la prostate et du colon-rectum sont les principales causes de décès par cancer chez les hommes. Chez les femmes, ce sont les cancers du sein, du colon-rectum et de l’uterus.
Après cette longue introduction, la FRANE souligne l’important travail réalisé par l’équipe d’animation (ARS / DREAL) qui, en assurant la médiation entre les différents niveaux du dispositif d’élaboration du PRSE 2 a permis d'aboutir à la présentation de l’avant-projet de plan régional santé environnement n°2. Et ceci dans un délai très bref compte tenu de l’importance de la tâche. Ayant participé aux travaux en ateliers, la FRANE, dont les représentants se sont exprimés au cours des diverses réunions est en accord avec la plupart des propositions qui figurent dans le texte soumis à la consultation et qui correspondent à une volonté d’améliorer des situations résultant de risques chroniques en Auvergne. Nous regrettons cependant le délai relativement court accordé pour travailler sur le plan, la participation quasi inexistante des collectivités départementales et régionale au travail des ateliers et une information copieuse mais bien trop tardive par voie de presse de la population pour l’inciter à s’exprimer sur l’avant-projet.
La région Auvergne se différentie des autres régions du territoire métropolitain par trois principales caractéristiques :
- La présence de radon dans le sol. Ce gaz radioactif présent à des degrés divers dans les quatre départements de la région, serait responsable d’environ 10% des cancers de l’appareil respiratoire. La surveillance des établissements recevant du public devrait être progressivement étendue aux habitations particulières et accompagnée d’une forte incitation des occupants à ventiler leurs logements.
- La présence d’arsenic dans l’eau potable est une autre spécificité de l’Auvergne. Il est relativement facile de ramener les teneurs en arsenic en dessous de 10 mg/ml.
- Enfin, la troisième est constituée par le risque infectieux lié à la qualité de l’eau. Notre région ne progresse que lentement dans l’amélioration de ce paramètre et la protection des captages devra être amplifiée, particulièrement dans le sud de la région.
La lecture de l’avant-projet amène de notre part les remarques suivantes.
La plupart des combustions (incinération des déchets, chaufferies industrielles et appareils domestiques fonctionnant au charbon ou au bois, écobuage, feux de forêts, brûlages divers à l’air libre, …) provoquent une pollution de l’atmosphére. Cette dernière est de nature particulaire et chimique (HAP, dioxines). Bien que les combustions s’effectuent de manière optimale, les rejets gazeux des chaudières industrielles et incinérateurs fonctionnant respectivement avec des granulés de bois ou des déchets devraient être mieux surveillés et les dispositifs d’épuration des fumées (lorsqu’ils existent) maintenus fonctionnels.
Les résidus d’extraction de minerais (uranium, plomb argentifère, …), pour lesquels il n’est pas actuellement envisageable de les stocker en décharges, doivent être mieux sécurisés (amélioration des conditions de leur confinement) pour éviter leur dispersion dans le milieu naturel, en particulier dans les cours d’eau. Un problème de même nature se pose pour les sédiments, parfois toxiques, accumulés dans les retenues de certains barrages. Ces résidus qui relèvent d’un stockage adapté à leur dangerosité nécessitent une réflexion concernant leur gestion à long terme.
Plusieurs cours d’eau d’Auvergne sont maintenant pollués par des PCB et la consommation de certains poissons qu’ils hébergent est interdite. Un recensement de toutes les rivières dont la consommation des poissons présente un risque pour la santé est indispensable. Cette remarque est aussi valable pour la présence de polluants chimiques divers (pesticides, biocides, perturbateurs endocriniens, …) issus principalement de l’agriculture et de l’industrie. Il est maintenant certain que des résidus ou métabolites de médicaments sont présents dans l’environnement et probablement dans l’eau de consommation. Il devient donc urgent d’améliorer le fonctionnement des stations d’épuration vis-à-vis de ces micropolluants souvent bioaccumulables dont on ne connaît pas l’impact à long terme sur la santé, encore moins lorsqu’ils sont mélangés à d’autres substances.
Un plan national d’action contre la pollution des milieux aquatiques par les micropolluants est en cours d’élaboration. Il serait utile de dresser un état des lieux (cartographie) en Auvergne concernant la présence de ces substances dans l’environnement et de le comparer avec des pathologies dont l’incidence est anormalement élevée dans certains secteurs de notre région. Cela permettra d’identifier et de gérer les zones géographiques pour lesquelles on observe une surexposition à des substances toxiques, notamment celles présentes dans les eaux.
L’épandage agricole, notamment les apports élevés en phosphore, contribue à l’eutrophisation des milieux aquatiques et à la dégradation de la qualité des eaux de baignade (présence de cyanobactéries). Cet épandage participe aussi à l’apport de résidus de médicaments résultant de leur utilisation en médecine humaine ou vétérinaire. Les grands élevages hors sols ainsi que les piscicultures doivent être l’objet d’une attention particulière. Nous demandons que les boues de station d’épuration utilisées en agriculture soient contrôlées vis-à-vis des micropolluants qui pourraient se retrouver dans l’alimentation. Il faut au moins systématiser la collecte des médicaments périmés ou inutilisés afin de réduire leur présence dans l’environnement. L'irrigation des terres agricoles, comme cela se produit en Limagne, avec de l'eau de mauvaise qualité devrait être proscrite.
Si la plupart des friches industrielles présentes en Auvergne sont connues des services officiels, il existe des sites”orphelins” ouverts à tous les vents qui peuvent encore contenir des transformateurs électriques au pyralène, des sols pollués par des métaux lourds et des polluants organiques persistants. En attendant leur réhabilitation (à la charge de la collectivité!), il importe de les gérer afin qu’ils ne contribuent pas à la dégradation de l’environnement et à la santé des riverains.
Les espèces invasives peuvent porter atteinte à la biodiversité et à la santé humaine. Par exemple, l’ambroisie produit un pollen allergisant et il convient au moins de contenir son expansion. De même, certains animaux de compagnie (NACs) importés légalement ou non, notamment des amphibiens, chiroptères, rongeurs, peuvent être porteurs d’agents infectieux redoutables. On rappellera que la plupart des maladies émergentes sont des zoonoses. Les risques d'allergies et de transmission de pathologies infectieuses risquent de s’amplifier avec le changement climatique. Le commerce ainsi que la détention des nouveaux animaux de compagnie devrait être plus sévèrement règlementé qu’actuellement. Nous citerons l’importance en Auvergne de la borreliose de Lyme, maladie transmise par les tiques qui ont pour réservoir les cervidés et les rongeurs sauvages et de l’échinococcose alvéolaire dont le campagnol est un hôte intermédiaire.
Les habitants de l’Auvergne, comme beaucoup de français, souhaitent pouvoir utiliser leur téléphone cellulaire, mais ressentent parfois une vive inquiétude vis-à-vis des antennes relais. Cela pose le problème général de l’exposition aux rayonnements électromagnétiques, question qui devrait faire l’objet d’un large débat au niveau régional.
Les substances issues des nanotechnologies envahissent notre quotidien, sans que soit connu avec précision leur impact sur la santé. Leur aptitude à franchir les barrières biologiques nous conduit à demander, dans un premier temps, leur interdiction dans les produits en contact avec le corps humain (cosmétiques, vêtements) ou les aliments (emballages). Il va de soi que toutes les précautions devront être prises pour protéger les personnes en contact avec de telles substances en milieu professionnel.
Concernant la qualité de l’air intérieur, on devra limiter au maximum l'exposition aux composés organiques volatils dégagés pendant et immédiatement après la rénovation de logements par des particuliers. Nous n’avons pas abordé les problèmes liés à l’habitat indigne (peintures au plomb, moisissures, acariens et autres allergènes, installations électriques défaillantes, …). De meme les nuisances (bruit, pollutions) générées par les transports routier et aérien. Ces sujets sont bien traités dans l’avant projet rédigé par l’équipe d’animation.
Pour terminer ce compte rendu, certes sous forme de catalogue, nous devons insister sur la nécessité d’informer les habitants de l’Auvergne sur les risques sanitaires lies à l’environnement. Cela implique la formation de spécialistes à divers niveaux, y compris chez les professionnels du bâtiment, et la création de relais de formation. Les associations (notamment de consommateurs et d’environnementalistes) devront jouer leur rôle en appui des professionnels formés à la santé environnementale et à la communication vers le public. L’information aux risques liés à certains comportements individuels est une priorité. Elle devra être amplifiée.