Un été à court d'eau, cessons les dérogations!

L’été 2017 va être chaud ; les réserves d’eau sont historiquement basses. Pour garantir l’approvisionnement en eau potable et protéger les milieux aquatiques, les préfets ont la responsabilité de limiter les divers usages de l’eau. Ce système est censé préserver les utilisations prioritaires en cas de crise : eau potable, santé, sécurité civile, le tout dans des conditions garantissant la préservation des écosystèmes aquatiques. Mais ce système de gestion prévoit des dérogations dont les effets peuvent être désastreux. France Nature Environnement demande la remise en question de ces dérogations aux mesures de restriction.

 

 

Seuils critiques : des limites infranchissables franchies

Le système des arrêtés préfectoraux fixe différents niveaux de restrictions d’usage, en fonction de l’intensité de la menace qui pèse sur la ressource en eau. Ces restrictions s’appliquent à tous : citoyens, collectivités, agriculteurs et industriels. Pomper plus d’eau détruirait les écosystèmes et menacerait l’approvisionnement en eau potable des populations ? Peu importe. Certains préfets autorisent à dépasser ces seuils critiques au moyen de dérogations accordées à différentes catégories d’utilisateurs. Alors que ces seuils, définis à partir de bases scientifiques et de façon concertée sur le territoire, devraient être de véritables lignes rouges, elles sont aujourd’hui systématiquement franchies.

 

Sécheresse : toutes les régions sont concernées

 

  • Risque de pénurie en eau potable en Bretagne cet automne

L’hiver dernier en Bretagne, le faible taux de pluie n’a pas suffi à remplir les nappes d’eau souterraines, qui servent à alimenter les cours d’eau en période estivale. Ceux-ci connaissent par conséquent des débits anormalement faibles depuis plusieurs mois déjà. Les dérogations de prélèvements sur des cours d'eau déjà en dessous du débit d'étiage[1], accordées dans plusieurs départements, viennent empirer la situation, mettant ainsi en péril le bon fonctionnement de l'écosystème aquatique. Un constat qui laisse présager des situations dramatiques dans les semaines à venir, avec un risque de pénurie d’eau potable à l’automne prochain en cas d’absence de « pluies efficaces » suffisantes d’ici-là.

 

  • Coupures d’eau potable en Charente-Maritime possibles avant la fin du mois de juillet

Déjà fortement sollicités lors des grands week-ends de mai, les réservoirs qui réalimentent le fleuve Charente afin de prélever l’eau pour la distribution en eau potable étaient à moitié vides au mois de juin. Avec l’arrivée des touristes, la consommation d’eau potable double en été dans le département (de 40 000 m3/jour à 80 000 m3/jour, avec des pointes à 170 voire 200 000 m3/jour entre le 14 juillet et le 15 août). S’il ne pleut pas abondamment, les réserves risquent d’être épuisées dès fin juillet, laissant présager des coupures d’eau potable !

 

  • La biodiversité aquatique malmenée en Rhône-Alpes

En Rhône-Alpes le niveau des nappes actuel est comparable à celui enregistré lors de la grande sécheresse de 1976, fin août. Et nous ne sommes que mi-juillet… Ce faible taux de remplissage est dû à la sécheresse hivernale : la région n’a connu aucune pluie importante depuis le début de l’automne 2016. Les épisodes pluvieux du début de l’été, même s’ils apportent quelques améliorations temporaires, ne seront pas suffisants pour épargner la biodiversité aquatique, très sensible à la température de l’eau et à la faiblesse des débits. Le département de l’Isère vient de passer en alerte et le nombre d’arrêtés sécheresse en cours augmente de jour en jour.

 

Système dérogatoire : symptôme d’une gestion de l’eau problématique

Alors que toutes les régions sont touchées par la sécheresse et que de nombreuses régions font face à des situations inhabituelles et alarmantes, la gestion de l’eau doit évoluer. C’est pourquoi France Nature Environnement appelle à une remise en question profonde des systèmes dérogatoires. Mais au-delà de cette problématique d’urgence, c’est l’ensemble du modèle qui doit être repensé. Le béton envahit nos sols ; les systèmes agricoles conventionnels leur ont fait perdre vie et structure ; les haies, bosquets, talus sont détruits. Ainsi, l’eau ruisselle, inonde, détruit, mais ne s’infiltre plus : il est urgent de protéger les sols de l’imperméabilisation.

 

Alors quel modèle pour l’avenir ? L’évolution du modèle actuel n’est pas suffisante pour répondre aux enjeux du partage de l’eau. Il est temps de se tourner vers une agriculture respectant les principes de l’agroécologie et d’adopter une véritable politique de protection de nos sols. Pour Jean-Claude Bevillard, pilote du réseau Agriculture de France Nature Environnement : « Il est urgent de réagir. Chaque mois en France, l’équivalent de 6400 terrains de foot sont bétonnés ; les sols agricoles ne retiennent plus suffisamment l’eau et ne lui permettent plus de s’infiltrer. A cause de ces phénomènes, les nappes se rechargent mal : c’est l’ensemble du cycle de l’eau qui est en péril. »

 

Pour Marc Saumureau, pilote du réseau Eau à France Nature Environnement : « Ce système dérogatoire est injustifiable. Quand tout le monde est d’accord pour dire que des pompages supplémentaires seraient dangereux, il est inconcevable qu’un préfet puisse continuer à distribuer des dérogations pour permettre d’aller au-delà de ce que les milieux peuvent tolérer. D’ici la fin de l’été, en plus des menaces sur les écosystèmes aquatiques qui vont être à sec, c’est même l’eau du robinet qui pourrait venir à manquer dans certains territoires. »

 

Préservation de la ressource : chacun peut agir

Des changements de pratiques doivent être mis en place à tous les niveaux : des systèmes agricoles adaptés aux conditions climatiques locales et moins gourmands en eau, des filières industrielles optimisées pour réduire la consommation en eau, la récupération d’eau de pluie et le recyclage pour l’arrosage et le nettoyage dans les collectivités... Il est par ailleurs essentiel de conserver et restaurer les milieux aquatiques et les zones humides dont le rôle est indispensable dans le cycle de l’eau.

 

[1] Débit d’étiage : débit moyen le plus bas d’un cours d’eau

Contacts presse :

Lorraine Levieuge, chargée de mission eau : 02 38 62 49 26 – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Carmen Etcheverry, chargée de mission agriculture : 01 44 08 64 12 – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Manon Laudy, chargée des relations presse : 01 44 08 02 51 / 06 07 69 27 10 – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 

Télécharger le communiqué au format PDF

France Nature Environnement est la fédération française des associations de protection de la nature et de l´environnement. C´est la porte-parole d´un mouvement de 3500 associations, regroupées au sein de 74 organisations adhérentes, présentes sur tout le territoire français, en métropole et outre-mer. France Nature Environnement, partout où la nature a besoin de nous. www.fne.asso.fr

Inscription Newsletter

captcha 

Se connecter